L'OR : UNE HONTE POUR LA GUYANE (1)
12/05/2012
Quand le prix de l'or augmente,
les hommes et la forêt souffrent
Depuis le début des années 2000 le cours international de l'or s''est envolé. Les derniers mois, crise financière aidant, le prix du précieux métal a battu jour après jour des records historiques. Pour s'approprier ce trésor enfoui aux quatre coins du globe l'humanité s'agite. En Guyane les uns et les autres sont entraînés dans une course folle pour l'extirper du sol, le vendre ou le troquer, légalement ou non. (Une saison en Guyane)
Le dossier ci-dessous est bien sûr incomplet. J'ai essayé de produire une « photographie-état des lieux » la plus actuelle possible. Cela veut dire que je me suis borné à prendre en compte les données « objectives » les plus récentes disponibles, et elles sont peu nombreuses, contrairement aux témoignages que l'on peut recueillir d'anciens orpailleurs, contrairement à ce que l'on peut observer dès lors que l'on remonte le Maroni.
J'ai banni également toutes informations qui ne me semblaient pas ou peu crédibles ou qui ne pouvaient être vérifiées.
Le Témoin en Guyane
Pour commencer, un état des lieux (quelque peu effrayant) :
- 200 à 500 sites illégaux sont situés sur toute la Guyane selon la gendarmerie. Et une vingtaine d'exploitations légales tournent en ce moment.
- on y compte au moins 3 000 garimpeiros auxquels il faut ajouter tous ceux qui leur apportent un soutien logistique, soit un total d'au moins 5 000 personnes (estimation gendarmerie).
- les opérateurs miniers « légaux » ont produit en 2010 1,2 tonne d'or. De manière générale, ils extraient entre 1 et 2 tonnes par an. Les illégaux en produisent 10 tonnes, voire plus.
- gendarmes et soldats ont saisi l'an dernier 11,71 kg d'or, 136 kg de mercure, 295 072 litres de carburant, 525 motopompes, 171 moteurs de bateaux, 164 armes (pour 5000 personnes ! note du Témoin), 279 pirogues, 174 quads et 74 autres véhicules.
Il faut noter en outre que :
- 1,3 kg de mercure est utilisé par kilo d'or récupéré ! (rapport Taubira 2000).
- 1 000 tonnes de boues sont rejetées par kilo d'or extrait (rapport Taubira 2000).
- 5 tonnes de mercure (Hg) sont rejetées chaque année dans le milieu naturel (atmosphérique et fluvial).
- 1,5 tonnes Hg par an vont directement ans les cours d'eau (rapport Etat des lieux de l'exploitation de l'Or en Guyane, mars 2005).
- L'INSERM a relevé en 1998 un taux d'imprégnation au mercure supérieur à la norme OMS chez plus de 70% des enfants amérindiens Wayana du Haut- Maroni.
Situons certains faits dans un contexte quotidien :
Neuf morts dans une fusillade entre chercheurs d'or en Guyane
Source : France Guyane 23/01/2012
Une fusillade sur un site d'orpaillage clandestin en Guyane a fait neuf morts et deux blessés graves dans la nuit de vendredi à samedi.
La fusillade s'est produite sur le site de Dorlin (sud-ouest guyanais). Elle a fait neuf morts et deux blessés graves, selon les « premiers éléments d'information que nous avons recueillis », a précisé le commandant de la gendarmerie en Guyane, le colonel Didier Laumont.
Celui-ci a expliqué qu'il s'agissait « d'une fusillade entre deux bandes qui se sont affrontées pour le contrôle de la zone. L'une des deux est soupçonnée d'être en possession d'armes de guerre ».
« L'une des deux bandes armées est une bande que nous avions essayée de neutraliser à l'occasion de notre dernière opération de démantèlement de chantiers aurifères clandestins sur Dorlin du 6 au 11 janvier dernier », a poursuivi le colonel. « Il s'agit d'une bande qui possède des fusils d'assaut, des armes de guerre ». Des militaires devraient aussi être envoyés sur place, ainsi qu'un membre du parquet, selon une source proche de l'enquête.
De source médicale, le Samu va également se rendre sur place (dimanche), avec un « hélicoptère civil affrété ».
« S'il y effectivement des blessés graves... on se demande dans quel état ils seront dimanche quand on enverra les hélicoptères », s'est cependant inquiété une source médicale sous couvert de l'anonymat (la fusillade ayant eu lieu vendredi soir, note du Témoin).
Le commandant de la gendarmerie a fait état de cette fusillade au président Nicolas Sarkozy, lors de la présentation du dispositif Harpie de lutte contre l'extraction illégale d'or, samedi après-midi à Cayenne. Devant l'état-major Harpie, M. Sarkozy a assuré que la lutte contre l'orpaillage clandestin, qui occasionne violences et dégâts écologiques (notamment la pollution des eaux par le mercure), allait s'intensifier.
Concernant l'arrivée tardive du Samu sur le site de Dorlin les Pouvoirs Publics auraient été accusés d'utiliser l'unique hélicoptère disponible au service de l'accueil de Nicolas Sarkozy et de son staff. Ce à quoi il a été répondu par communiqué que seuls la couverture nuageuse et le camouflage du site sous la canopée auraient été responsables de la décision d'envoyer tardivement les secours... Voir ci-contre pour se rendre compte...
L'orpaillage en Guyane
Avertissement : Wikipedia ne peut être considéré comme une source d'information absolument sûre, chacun(e) pouvant y ajouter ses propres avis. J'y ai glané ce que je pense «sincère et véritable», en fonction de ce que j'ai lu, de ce que j'ai vu ou de ce que l'on m'a rapporté de source vérifiable.
La Guyane française est un des territoires sud-américains recelant de l'or. Quelques entreprises y exploitent ce métal de façon légale, mais de très nombreux sites d'orpaillage sont illégaux. Là, dans ce gigantesque département français situé en Amérique du sud, plusieurs milliers de chercheurs d'or clandestins, venus principalement de régions défavorisées du Brésil ou du Suriname, les garimpeiros, exploitent le sous-sol, avec tous les problèmes qui en découlent : saccage d'une des forêts tropicales uniques au monde, la moins fragmentée pour cette surface. Le mercure des orpailleurs (produit utilisé pour agglomérer les petites particules d'or) contamine les populations amérindiennes, et un climat de violence de type Far West grandit depuis les années 1990, dont les Brésiliens et orpailleurs eux-mêmes sont victimes.
Le Parc national du sud de la Guyane (ou Parc national amazonien de Guyane) lui-même n'a pas échappé à l'orpaillage illégal. L'Office national des forêts a estimé fin 2005 qu'en Guyane 1.333 km de cours d'eau étaient directement impactés par les chantiers miniers, légaux comme illégaux, et 4.671 km de fleuves et rivières touchés par les pollutions, en aval de ces chantiers. De plus, de 2000 à 2005, les déboisements des orpailleurs sont passés de 4000 à près de 11 500 hectares.
La Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) évalue chaque année le butin des clandestins à entre 5 et 10 tonnes d'or. Au prix de l'once en 2008, cela représente entre un peu moins de 120 millions et 220 millions de dollars, comme l'indique le journaliste Axel May dans « Guyane française, l'or de la honte ».
En 2007, 113 opérations « Anaconda » ont été conduites contre les orpailleurs clandestins, n'ayant que freiné leur expansion, malgré une destruction de matériel pour une valeur de 23 millions d'euros, la saisie de 12 kg d'or et de 71 kg de mercure. Le GIR (Groupe d'intervention régional) avec la justice guyanaise ont mis en évidence des réseaux d'immigration clandestine, de proxénétisme, de contrebande. Un risque est de reporter la pression d'orpaillage sur le Suriname voisin, encore plus touché que la Guyane.
Les opérateurs miniers légaux, minoritaires, ne sont pas non plus irréprochables ; ils tentent de redorer leur blason.
Bien que la Guyane soit légalement un département français au même titre que les Hauts-de-Seine ou la Creuse, et non une « vague » collectivité d'outre-mer, face à l'activité aurifère clandestine, l'État français a réagi très mollement. Ironie de l'histoire, l'inventaire des ressources minérales guyanaises, fait par le BRGM, a été réalisé et rendu public par l'État (ce qui a eu pour effet d'indiquer aux orpailleurs, illégaux ou autres, où aller creuser à coup sûr... NdTémoin).
Cependant, depuis mars 2008, une opération d'envergure est menée sous le nom d'opération « Harpie », et commence à porter ses fruits... dit-on. Les opérations militaires se multiplient sur les sites clandestins, avec destructions systématiques de tout le matériel trouvé sur place et des contrôles renforcés, tant sur les routes que sur les fleuves. Mais la tâche à accomplir reste immense pour éradiquer ce fléau.Les orpailleurs clandestins, bénéficiant parfois de la téléphonie moderne et du GPS et/ou encadrés par des réseaux mafieux et armés, se sont faits plus mobiles et discrets depuis les années 1990. Opérant parfois aussi de nuit, et sous le couvert des arbres, ils se rendent plus difficile à repérer. L'administration ne connaît pas leur nombre exact. Les clandestins brésiliens ou surinamiens reconduits à la frontière reviennent souvent orpailler en Guyane. Le mercure et les carburants, ainsi que les armes, la drogue et l'alcool, font également l'objet d'un commerce caché, qui s'accompagne localement de prostitution et violences.
La recherche et la vente clandestines de ce métal génèrent aussi de graves conflits sociaux, médiatisés notamment par le film du documentariste Philippe Lafaix la Loi de la jungle, plusieurs fois primé. Ce film explique comment des milliers de clandestins travaillent en Guyane dans des conditions très difficiles, sans aucune couverture sociale ni sanitaire, souvent soumis à la violence (pots de vin, travail forcé, vols, torture, agressions, meurtres...).
À suivre
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