Un Témoin en Guyane, écrivain - le blog officiel

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LA SPIRALE DE L'EXCLUSION EST EN PLACE

18/06/2022

 

La violence en réponse à la violence

 

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Qui dit exclusion dit ressenti de violence.

 

 

Selon de nombreux sociologues, la violence des victimes est la réponse à la violence institutionnelle ou sociétale, cela n’est plus à démontrer.

La jeunesse de la population – théoriquement une richesse en soi – constitue de fait un problème. Au niveau public, les collectivités locales ne suivent pas sur le plan budgétaire la croissance des besoins en matière d’infrastructures et d’aménagement. Les familles ayant rejoint la périphérie de Saint-Laurent s’entassent de plus en plus nombreuses dans des espaces réduits et ont de plus en plus de difficultés à éduquer leurs enfants. Le chef coutumier est absent, l’oncle-référent familial parfois également. Le modèle traditionnel d’éducation, lorsqu’il perdure, n’est aucunement adapté à une société de type occidental au regard tourné
vers les États-Unis. C’est la disparition du : « 
Pour élever un enfant, il 5d964cb96d46a_photo-2019-01-22-11-00-40-998021.jpg
faut un village
 ». La violence apparaît, suivie immédiatement de ses corollaires, la délinquance, de plus en plus tôt, accompagnée souvent par des formes, même légères, de prostitution. Il n’est pas rare de voir un(e) adolescent(e) se « payer » le dernier modèle de téléphone portable en échange de menus services sexuels.

 

Plutôt qu’un levier de développement, cette jeunesse dont on ne sait que faire est donc un facteur d’appauvrissement et de déstabilisation. 

Qu’observe-t-on ? Les valeurs qui permettent l’insertion sociétale, traditionnelle ou « à l’occidentale », sont-elles érodées ? Qu’en est-il de l’éducation, du respect entre individus, générateur de dignité ? Qu’en est-il des outils qui occasionnent l’installation de ces valeurs ? Quid de l’École ? Quid de l’habitat ? Surtout, quid de la visibilité, de la cohésion sociale ? Si les valeurs ne font pas sens, la vie et l’avenir, pour tous ces Capture.JPG
jeunes de moins de 25 ans, qui représentent tout de même 70 % de la population dans l’Ouest guyanais, ne font plus sens non plus. D’où l’inefficacité des modes de prévention ou de répression habituels, qu’ils soient culturels ou institutionnels, tant qu’ils restent définis en fonction d’un modèle qui se trouve à 8000 km au sein d’une société qui historiquement, socialement et économiquement n’a pas grand-chose à voir avec ce
lle de l’Ouest guyanais.

   La délinquance

Si l’on reprend les chiffres de la scolarisation, l’on a dans l’absolu 11 000 jeunes qui quittent les études aux alentours de 15-16 ans, dont 5 500 à Saint-Laurent. Et cela correspond à ce que l’on peut observer dans les rues : des foules de jeunes de 16 à 25 ans qui traînent toute la journée et souvent aussi la nuit, autour de points de ralliement différents selon les bandes, les heures et les jours de la semaine. Cela s’explique par deux raisons, principalement. La première, la plus massive, c’est que si l’avenir ne fait pas sens, autrement dit si travailler à l’école ou au collège ne garantit pas (lucidité…) d’envisager de gagner sa vie plus tard, pourquoi continuer ? La seconde c’est que souvent ces jeunes sont en rupture familiale, soit par leur décision, soit que les parents, restés sur le fleuve ou reconduits au Suriname après une OQTF[1] ne sont plus en mesure, ni moralement, ni économiquement, d’assumer leurs enfants. Pour changer d’établissement scolaire, il faut refaire tout le dossier d’inscription, donc chercher à nouveau des preuves d’état-civil que les parents ne sont plus là

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pour fournir. D’où une déscolarisation institu-tionnelle au pays des Droits de l’Homme (droit à l’éducation, notamment).

Il faut qu’une prévention intervienne avant que les jeunes n’atteignent la tranche d’âge en question. Pour ces derniers, il est sans doute trop tard pour l'anticipation, il faut plutôt se diriger vers des actions de dissuasion qui restent à définir. La loi et ses représentants n’ont plus aucun effet dissuasif, semble-t-il, bien au contraire.

 

[1] Obligation de quitter le territoire français.

Pour certains il s’agira de « niquer le Blanc » Je dois dire que jusqu’à une époque récente, je n’avais jamais vu un gendarme noir. Ceux-ci ont plutôt la couleur de peau du préfet ou des juges devant lesquels il arrive à ces jeunes de devoir se présenter. Pour rire un peu, disons qu’en Guyane un Noir en uniforme est soit un agent de sécurité (un vigile à l’entrée du Super U, par exemple) soit un agent de Police municipale. Pas de Police nationale, pas de Gendarmerie. Ceux-là sont importés de Métropole. Il y a dans le ressentiment suscité un quelque chose qui rappelle les riches heures de la colonisation, voire – à tort ou à raison – de la période esclavagiste.

Capture3.JPGPour les autres, il faudra que nous apprenions à compter avec les croyances en de multiples possessions et réincarnations. Rien à voir avec les fous de Dieu d’autres religions, ici cela a toujours existé. Et surtout, la vie s’est construite au cours des siècles avec ces Obia, Yorka et autres. Les nier reviendrait à génocider une culture humaine.

62281.HR.jpgParmi tous ces jeunes déscolarisés, récemment ou de plus longue date, souvent un au moins par famille est, a été… ou sera incarcéré.

L’accompagnement à la sortie pour lui et son entourage reste à construire, urgemment !

Mais… pourra-t-il se faire sans restaurer la voix des anciens, les autorités coutumières dans leur rôle initial de régulation et de cadrage social, une fonction que la société occidentale, avec son droit et ses règles importées, leur a confisquée ?

 OKwadjani

 

 Retrouvez bientôt la prochaine chronique d’Olson sur Un Témoin en Guyane


18/06/2022
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